La chorale de jeunes a été évincée des images télévisées lors de la cérémonie d’ouverture de la Coupe du monde de rugby le 8 septembre au Stade de France. Les spectateurs ont simplement constaté un écho pénible entre les enfants, les joueurs et les supporteurs, constate dans sa chronique Michel Guerrin, rédacteur en chef au « Le Monde ».
Il n’y a pas eu un simple scandale mais plutôt une honte. Nous parlons ici de l’interprétation de la Marseillaise, chantée a cappella par des enfants sur la pelouse du Stade de France le 8 septembre lors de la cérémonie d’ouverture de la Coupe du monde de rugby. La honte ne réside pas dans le fait que les enfants aient chanté l’hymne, mais dans ce qu’ils ont subi depuis un an.
Au départ, en avril 2022, la « mêlée des chœurs » avait de grandes ambitions. Recruter 7 000 élèves de 9 à 16 ans, principalement dans les quartiers populaires des neuf villes accueillant les matches de la Coupe du monde. Leur apprendre plusieurs hymnes des vingt pays participants. Les faire chanter pour chaque match. Sous l’autorité de la Maîtrise populaire de l’Opéra-Comique, à Paris, 700 enseignants étaient impliqués. Le chanteur pop Mika était même devenu parrain du projet.
France 2023 (comité d’organisation) et les ministères impliqués (sports, éducation, culture) vantaient un projet éducatif en accord avec les « valeurs de partage du rugby ». Mais en mars, les enfants ont subi une énorme déception. On leur a annoncé qu’ils ne seraient présents sur le terrain que lors de la cérémonie d’ouverture et des phases finales, soit seulement 9 matches au lieu des 48 prévus, à Saint-Denis (Seine-Saint-Denis) et à Marseille. Chaque chorale serait réduite à 170 jeunes au lieu de 300. La grande majorité des 7 000 jeunes seraient ainsi écartés des terrains, se contentant simplement d’enregistrer les hymnes diffusés pendant les matches de poules.
Coupe du monde de rugby : « La honte, ce n’est pas l’interprétation de la “Marseillaise” par les jeunes chanteurs, mais …
Une polémique inutile
La Coupe du monde de rugby bat son plein, avec des matchs palpitants, des prouesses sportives et une ambiance électrique dans les stades. Malheureusement, un événement mineur a pris des proportions démesurées ces derniers jours : l’interprétation de la « Marseillaise » par de jeunes chanteurs lors d’un match. Certains ont crié au scandale, affirmant que cela constitue une honte pour notre pays. Mais, sincèrement, la honte ne réside pas dans l’interprétation de ces talentueux jeunes artistes…
La polémique autour de l’interprétation de la « Marseillaise » à la Coupe du monde de rugby.
Valoriser notre patrimoine culturel
L’interprétation de l’hymne national par des jeunes chanteurs est une initiative louable visant à valoriser notre patrimoine culturel et à promouvoir la diversité musicale. Ces enfants, véritables ambassadeurs de notre héritage musical, ont offert une performance touchante et émouvante. Leur voix pure et leurs sourires radieux transmettaient une immense fierté et une volonté de faire briller notre pays à travers la musique.
Briser les stéréotypes
Au-delà de la performance en elle-même, cette apparition sur la scène internationale permet également de briser les stéréotypes associés au rugby. Souvent perçu comme un sport masculin, brut et viril, il est rafraîchissant de voir de jeunes artistes, filles et garçons, partager leur passion pour le chant pendant un événement sportif. Cela montre que le rugby est un sport ouvert à tous, peu importe son sexe ou ses talents artistiques.
Recentrer l’attention sur l’essentiel
Il est temps de remettre les choses en perspective et de recentrer notre attention sur l’essentiel : les performances des joueurs sur le terrain. La Coupe du monde de rugby est une compétition majeure qui mérite d’être célébrée pour les exploits sportifs qu’elle engendre. Les détails mineurs, comme l’interprétation de l’hymne national, ne devraient pas prendre le pas sur l’ensemble de l’événement.
Alors, supporters et passionnés, concentrons-nous sur les matchs, soutenons nos équipes avec ferveur et laissons les jeunes chanteurs et chanteuses continuer à partager leur amour pour la musique. Soyons fiers de notre culture et soutenons tous ceux qui la mettent en lumière, que ce soit sur un terrain de rugby ou sur une scène musicale.
Vive la Coupe du monde de rugby, vive le sport et vive la musique !
Les raisons derrière cette décision
Ces ajustements ont été demandés par World Rugby, la fédération internationale, qui, selon le journal Le Parisien du 7 avril, n’était pas au courant du projet initial. Parmi les motifs avancés, il y avait la crainte que les enfants n’endommagent la pelouse. L’indignation des jeunes, des parents et des enseignants a été énorme et une pétition a même été lancée. Cependant, une sélection a dû être effectuée par la suite pour choisir les participants…
Un projet artistique fragilisé
Une ambition joyeuse a été brisée et, pour aggraver les choses, le projet artistique s’en est trouvé fragilisé. Les hymnes avaient en effet été arrangés en polyphonie, avec des mots chantés sur des tons différents. Le résultat était certes stimulant, mais plus complexe pour les enfants et déroutant pour le public que de simplement chanter tous ensemble à l’unisson, surtout lorsque 80 000 personnes reprenaient le chant au Stade de France.
Pour que tout le monde soit d’accord, tous les hymnes, enregistrés en juin, ont été écoutés et validés par les pays participants. Cependant, une interprétation sur le terrain avec seulement 170 enfants au lieu de 300, même avec une sonorisation, n’est pas la même chose. Fallait-il prendre aucun risque et diffuser un enregistrement lors du match d’ouverture entre la France et la Nouvelle-Zélande ? Cela aurait été encore une autre déception pour les enfants. En revanche, il était nécessaire que les présentateurs à la télévision expliquent le projet avant la rencontre et que les enfants soient bien visibles à l’écran pendant leur chant. « Ils seront mis à l’honneur », promet France 2023.
Il est regrettable que cette expérience unique pour les jeunes participants ait été réduite et altérée. Espérons que malgré ces ajustements, les enfants auront tout de même une belle expérience et que leur voix résonnera dans les stades lors des grands moments de ce tournoi de rugby tant attendu.
Source: lemonde.fr